Addictions France met un carton rouge au « marketing agressif » des paris sportifs
La dernière campagne d’Addictions France alerte sur l’ampleur des stratégies commerciales déployées par les opérateurs de paris sportifs. Elle dénonce un « marketing agressif » qui accentue les risques d’addiction, en particulier chez les jeunes. L’association réclame un renforcement de la réglementation.
Addictions France siffle la fin du match. Dans sa nouvelle campagne « Carton rouge : le marketing agressif des paris sportifs » lancée le 16 septembre, l’association dénonce les pratiques marketing féroces des opérateurs de paris sportifs. Avec le slogan « Tu joues, tu perds. Ils encaissent », elle souhaite sensibiliser sur les risques d’addiction (lire aussi notre article), notamment chez les jeunes. La publicité omniprésente et la mobilisation des influenceurs ne faisant que participer à cette stratégie redoutable.
Paris sportifs : un marché en plein essor porté par la publicité
Depuis 2010 et l’ouverture de sites internet d’opérateurs, les paris sportifs connaissent un essor spectaculaire en France. Ils sont désormais la deuxième pratique de jeu d’argent la plus courante derrière les loteries. En 2024, année marquée par l’Euro et les Jeux olympiques de Paris, les mises en ligne ont atteint 1,8 milliard d’euros, selon le Bilan du marché des jeux d’argent et de hasard 2024 de l’Autorité nationale des jeux (ANJ).
Cette même année, les opérateurs ont investi 670 millions d’euros en publicité, un record. Sponsoring de clubs, affichage ciblé pendant les matchs, slogans accrocheurs : tout est mis en œuvre pour associer compétition sportive et pari en ligne. Et ça marche, puisque 62 % des parieurs reconnaissent avoir joué sous l’influence d’une publicité.
Les influenceurs pour capter les jeunes
Dans son rapport, Addictions France a analysé plus de 2 300 contenus. Parmi eux, plus de la moitié proviennent d’un compte influenceurs. Cette promotion intensive sur les réseaux sociaux cible principalement les jeunes. Un public particulièrement sensible aux stratégies marketing agressives, encouragé à rejouer via des offres promotionnelles et des notifications nombreuses. En 2022, 57 % des adolescents de 17 ans déclaraient alors avoir été exposés à une publicité pour les paris sportifs au cours de la semaine. De plus, 72 % des parieurs ont moins de 35 ans.
Une addiction coûteuse pour la société
L’addiction aux jeux d’argent est reconnue comme une maladie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Elle a des conséquences lourdes : dettes, isolement social, troubles psychologiques. Le coût social du jeu excessif en France est estimé à 15,5 milliards d’euros par an.
« L’industrie des paris sportifs prospère sur l’illusion et la dépendance, alerte Myriam Savy, directrice de la communication et du plaidoyer chez Addictions France. Elle veut faire croire qu’aimer le sport, c’est parier. Il est temps d’en finir avec cette banalisation qui menace la santé publique ».
Changer les règles du jeu
Malgré l’encadrement posé par l’ANJ, la régulation apparaît insuffisante. Ainsi, 30 % des contenus d’influenceurs, principalement éphémères comme les stories Instagram, ne respectent pas les directives. D’autant que 80 % omettent les messages sanitaires obligatoires.
Face à ces dérives, l’association appelle à des mesures fortes : interdiction de la publicité pour les jeux d’argent sur les réseaux sociaux, à la télévision et à la radio et à proximité des établissements scolaires, universités et lieux de santé, fin du sponsoring sportif, suppression des gratifications financières et mise en place de sanctions réellement dissuasives, à l’image de la loi Evin sur l’alcool et le tabac.