Acouphènes : mieux prédire leur évolution
Deux études lèvent le voile sur l’évolution et la sévérité des acouphènes et sur leur perception pendant le sommeil. Leurs résultats permettent de mieux comprendre ce trouble auditif afin d’améliorer sa prévention et sa prise en charge.
L’Institut reConnect, sous l’égide l’Institut Pasteur, vient de mettre en lumière deux études consacrées aux acouphènes. Il s’agit de « sons fantômes » (sifflements, bourdonnements…) perçus sans source sonore externe. Ils concernent environ 14 % des personnes dans le monde. Si certains les supportent sans difficulté, d’autres vivent un véritable calvaire. Au point qu’ils peuvent être source de troubles du sommeil, d’anxiété, de dépression ou encore de perte de concentration. À ce jour, aucun traitement curatif n’existe. L’enjeu est donc de mieux comprendre les facteurs de risque pour affiner la prévention et la prise en charge.
Anticiper l’évolution des acouphènes
Une équipe de l’Institut reConnect à l’Institut de l’Audition (Institut Pasteur, Institut national de la santé et de la recherche médicale, Centre national de la recherche scientifique), en collaboration avec l’Université McGill au Canada, a analysé les données de près de 200 000 personnes. Parmi eux, plus de 40 000 souffrent d’acouphènes. Les chercheurs ont mis au point un modèle prédictif capable d’anticiper l’évolution des acouphènes sur une période de 9 ans.
Les résultats, publiés dans la revue Nature Communications, montrent que si la santé auditive est un facteur clé dans l’apparition des acouphènes, leur sévérité est aussi fortement liée à l’état psychologique (troubles de l’humeur, du sommeil…) de l’individu. « Ce modèle a été simplifié sous la forme d’un questionnaire de six questions à visée clinique qui permettront d’identifier les personnes les plus à risque de souffrir d’acouphènes sévères dans le futur », expliquent Lise Hobeika et Séverine Samson, coauteurs de ces travaux dans un communiqué.
Acouphènes et sommeil : que se passe-t-il la nuit ?
Une autre étude, publiée cette fois-ci dans Hearing Research, a essayé de répondre une autre question : les acouphènes sont-ils perceptibles pendant le sommeil ? Les chercheurs de l’Institut reConnect, en collaboration avec l’Université Grenoble Alpes, ont donc étudié le sommeil de 195 patients.
« Parmi eux, 148 pouvaient se souvenir de leurs rêves et 94,6 % ont statué ne pas avoir entendu d’acouphènes », indique le communiqué. « Pour le reste des patients qui entendent leurs acouphènes en rêvant, ils présentent généralement un fardeau acouphénique plus élevé, ressentent davantage de stress et souffrent d’autres pathologies auditives ou comorbidités », expliquent les rédacteurs.
L’étude met aussi en lumière la présence d’acouphènes au cours des rêves lucides, c’est-à-dire quand la personne est consciente qu’elle est en train de rêver. Sur les 12,2 % de rêveurs lucides, seulement 38 % ont rapporté avoir entendu leurs acouphènes. De façon générale, les acouphènes sont donc assez peu perçus pendant le sommeil. « Les chercheurs ont aussi relevé que l’état de conscience accrue coexiste avec une absence d’acouphènes, suggérant ainsi que les sons externes durant le sommeil pourraient agir comme un interrupteur des acouphènes », rapporte l’Institut reConnect.
Mieux comprendre ce trouble auditif
Ces deux études complémentaires ouvrent la voie à une meilleure compréhension des acouphènes. À l’heure où les troubles auditifs progressent avec le vieillissement de la population et l’usage croissant d’écouteurs (lire aussi notre article), ces avancées représentent un pas essentiel pour une prévention plus efficace.