Charlotte Bouvard : « Les soins au développement de l’enfant prématuré sont fondamentaux pour son évolution. »
Depuis 2004, SOS Préma se bat pour donner à tous les prématurés les meilleures chances de bien grandir. Soutien et accompagnement des familles, travail en collaboration avec les équipes médicales et sensibilisation des pouvoirs publics : Charlotte Bouvard, directrice de l’association, nous explique ses missions.
Pourquoi avez-vous créé SOS Préma ?
Mon deuxième enfant est né prématurément en janvier 2004. Dès sa naissance, il a été transféré dans un service de réanimation à l’autre bout de Paris et je ne l’ai rencontré que quatre jours plus tard. Ça a été très dur. Et les choses ne se sont pas arrangées lorsque mon fils a été enfin autorisé à nous rejoindre à la maison, un mois plus tard. Lorsqu’il arrive chez lui, l’enfant doit s’adapter à un nouveau milieu, à de nouveaux sons, de nouvelles odeurs : c’est très compliqué, encore plus pour un bébé prématuré. J’étais épuisée, je me sentais seule au monde et il n’y avait aucun accompagnement prévu pour m’aider. Nous avons tellement souffert que j’ai souhaité que plus jamais des parents ne vivent cette solitude et cette détresse. C’est pour cela que j’ai créé l’association la même année, en octobre.
Quelles sont vos actions ?
Nous avons trois axes de travail : tout d’abord, l’aide et le soutien aux familles avec notre permanence d’écoute téléphonique (numéro vert : 0 800 96 60 60, NDLR) assurée par des parents qui ont connu la prématurité et des professionnels spécialisés. Nous avons aussi 70 antennes locales tenues par des parents qui proposent un soutien de proximité : des visites dans les services de néonatalogie, des cafés parents, ou de la récolte de fonds pour équiper les hôpitaux. Le deuxième axe de notre action consiste à travailler en étroite collaboration avec les hôpitaux : nous participons à des groupes de réflexion avec les équipes soignantes pour l’harmonisation de la prise en charge de ces enfants et nous organisons des journées de formation où l’on forme les soignants au vécu des parents pour les aider à améliorer leur pratique. Enfin, troisième axe, nous sensibilisons les pouvoirs publics à ces questions.
Vous avez beaucoup œuvré à la reconnaissance de la place des parents dans la prise en charge. Où en est‑on aujourd’hui ?
On a beaucoup avancé, même si ça reste très inégal d’un territoire à l’autre. La plupart des services de néonatalogie sont d’accord pour dire que les soins de développement de l’enfant sont fondamentaux pour son évolution. Cela veut dire que les parents font partie intégrante de la prise en charge, ils doivent pouvoir être présents 24 heures sur 24 et être des partenaires de soins. Les soins des parents (peau à peau, allaitement, etc.) sont complémentaires des soins médicaux. Les études le prouvent : la présence des parents favorise un meilleur développement du bébé à long terme. Malgré ça, les moyens manquent et tous les hôpitaux n’ont pas la possibilité d’assurer ce type de prise en charge. J’ajoute que la crise sanitaire a beaucoup fait régresser la situation. À cause du Covid-19, certains services de néonatalogie ont totalement fermé leurs portes aux parents pendant le confinement. Même si cela s’est assoupli depuis, il y a encore des services avec des heures de visites fixes. C’est inacceptable.
Quelles sont vos plus grandes réussites ?
Il y a d’abord l’allongement du congé maternité pour les mamans d’enfants prématurés que l’on a fait voter en 2006 et aussi la création d’un congé paternité spécifique en cas d’hospitalisation du nouveau-né, entré en vigueur le 1er juillet 2019. Aujourd’hui, quand un papa a un bébé prématuré ou hospitalisé à la naissance, il a droit à 30 jours en plus du congé paternité pendant l’hospitalisation. Ces deux grandes avancées ont été possibles grâce au travail de SOS Préma auprès des pouvoirs publics. Après, à titre plus personnel, il y a ce bonheur d’avoir créé cette belle association sans laquelle rien n’aurait été possible.
© C I E M / Propos recueillis par Delphine Delarue
Pour soutenir SOS Préma : Sosprema.com