Syndrome d’Ehlers-Danlos : limiter l’errance diagnostique
Le syndrome d’Ehlers-Danlos (SEDh) désigne treize affections héréditaires altérant la structure du tissu conjonctif, en particulier le collagène. Toutes les formes ont des points en commun : des articulations très souples, une peau un peu trop extensible et une fragilité des tissus avec une cicatrisation anormale. Alors que l’errance diagnostique est longue, comment le repérer ?
De toutes les formes du syndrome d’Ehlers-Danlos, la forme hypermobile est la plus répandue, mais il existe par exemple une forme vasculaire* de cette maladie. Les différents types n’exposant pas aux mêmes complications, leur pronostic et leur prise en charge diffèrent. Leur prévalence globale est estimée à 1 pour 5 000 individus, ce qui en fait des maladies rares. Si la forme classique n’engage pas le pronostic vital, elle peut affecter fortement le quotidien en raison de douleurs persistantes. De manière générale, les consultations concernent en grande majorité des femmes (plus de 90 %), les œstrogènes semblant aggraver les symptômes. Le diagnostic reste souvent long à établir, car les signes cliniques ne sont pas spécifiques, multiples, parfois atypiques, et les examens de routine (bilans sanguins, imagerie, endoscopie) reviennent normaux, dans la grande majorité des cas.
Peau fine, douleurs, hyperlaxité…
La forme hypermobile du syndrome d’Ehlers-Danlos provoque des douleurs chroniques (au moins trois mois par an) touchant les articulations, les muscles (crampes…), le dos, l’abdomen, la poitrine (coup de couteau, serrement) et la tête. Une fatigue marquée, dès le réveil, est fréquente. La proprioception est altérée : maladresse, chocs contre les meubles, objets échappés, entorses, morsures de langue ou de joue, fausses routes. La peau est fine, transparente, cicatrise lentement et garde des marques visibles. Et des saignements spontanés (nez, gencives, règles abondantes) peuvent entraîner une carence en fer. Le système nerveux autonome est instable, à l’origine d’un syndrome de l’intestin irritable, de constipation, de chute de tension au lever (hypotension orthostatique), de palpitations, d’extrémités froides voire de troubles urinaires. Viennent s’ajouter une hypersensibilité auditive, olfactive, cutanée, des troubles visuels ou un mal des transports. Point clé, l’hypermobilité articulaire est très marquée (pont, grand écart, position du lotus), avec des craquements articulaires. L’évolution est irrégulière, ponctuée de crises déclenchées par la fatigue, le stress, une maladie ou une opération et peut conduire à un épuisement très important.
Quand y penser ?
Les signes permettant de suspecter une forme classique du syndrome d’Ehlers-Danlos sont une peau très extensible, des cicatrices fines et larges (atrophiques) et des articulations très mobiles. On peut aussi retrouver au moins trois des symptômes suivants, selon Orphanet** : une tendance aux bleus (ecchymoses), une peau fragile, douce et « pâteuse » au toucher, des petites tumeurs bénignes ou des bosses sous la peau, des hernies, des plis de peau au coin des yeux, des complications liées à l’hypermobilité articulaire, ou des antécédents familiaux au premier degré ayant les mêmes symptômes.
Comme il n’existe aucun traitement curatif pour la forme hypermobile du syndrome d’Ehlers-Danlos, outre la prévention en évitant les traumatismes et les étirements excessifs, la prise en charge est symptomatique avec de la physiothérapie (proprioception, tonification, postures), des anti-inflammatoires pour aider à soulager les douleurs articulaires, des techniques de relaxation (autohypnose, sophrologie, approche cognitivo-comportementale), un soutien psychologique voire la réorganisation de l’activité professionnelle. Enfin, la stimulation magnétique associée à l’oxygénothérapie est en cours d’évaluation.
* La gravité de cette maladie tient à la fragilité tissulaire. Les patients sont prédisposés à la survenue de rupture spontanée vasculaire, digestive et utérine.
** www.orpha.net : connaissances sur les maladies rares et les médicaments orphelins
Hélène Joubert