Atteint d’une tumeur au cerveau depuis l’âge de 6 ans, le jeune Lucas a réussi à guérir de la maladie. Une première mondiale qui intéresse désormais les chercheurs du monde entier.

© Shutterstock

Tumeur rare du cerveau : un enfant guérit, une première mondiale

Atteint d’une tumeur du cerveau depuis l’âge de 6 ans, le jeune Lucas a largement dépassé l’espérance de vie d’un an qu’on lui promettait : il en a aujourd’hui 13. Un cas unique de rémission qui intéresse désormais les chercheurs en cancérologie du monde entier.

Lucas, 13 ans, a passé plus de la moitié de sa vie avec une tumeur du cerveau. Le gliome infiltrant du tronc cérébral qu’on lui a diagnostiqué lorsqu’il avait 6 ans, inopérable et sans solution médicamenteuse, aurait dû l’emporter en 9 à 12 mois. Sept ans plus tard, Lucas est toujours vivant. Mieux, il est totalement guéri. 

« Lucas a explosé tous les compteurs de vie »

Une situation inespérée, d’abord permise par le choix des parents du jeune garçon. Ils décident, dès le diagnostic, de le faire soigner en France et de le laisser participer à des essais cliniques d’un nouveau genre, sous la direction du cancérologue Jacques Grill. Ce dernier, à la tête du programme « Tumeurs cérébrales » au sein du département de cancérologie de l’enfant, à l’institut Gustave-Roussy de Villejuif (94)a ainsi pu tester une nouvelle approche : une thérapie ciblée. « Lucas a explosé tous les compteurs de vie, raconte le spécialiste à l’AFP. Au fil des IRM, j’ai vu la tumeur complètement disparaître. »

Malgré de premiers résultats montrant une rémission totale, le Dr Jacques Grill préfère dans un premier temps continuer le traitement, méfiant face à ces résultats inespérés. La rémission est finalement confirmée il y a un an et demi, lorsque Lucas lui révèle qu’il a déjà arrêté le traitement de lui-même, et qu’aucune trace de réapparition du cancer n’est détectée.

Une tumeur agressive et inopérable

Réputé particulièrement agressif et jusqu’ici incurable, le gliome infiltrant du tronc cérébral touche entre 50 et 100 enfants de moins de 14 ans chaque année dans l’Hexagone.

La tumeur s’attaque au pont, une zone située sous le cerveau qui gère des fonctions vitales telles que la fréquence cardiaque, la respiration, la tension artérielle ou l’équilibre. Des nerfs liés à la parole, l’audition ou la vision traversent aussi cette zone du cerveau. Dérivé des cellules gliales présentes en nombre dans le cerveau et essentielles à la protection, la nutrition et l’oxygénation des neurones, le gliome infiltrant se mêle aux cellules non-cancéreuses, empêchant toute intervention chirurgicale qui n’endommagerait pas ces cellules saines et les fonctions vitales du corps.

Une deuxième mutation observée chez Lucas

De nombreux gènes sont par ailleurs impliqués dans le système nerveux et participent à rendre chaque cerveau unique. Lors de l’apparition d’une tumeur, ces génomes se remodèlent et mutent. Cette mutation génétique rend les cellules tumorales plus résistantes à des chimiothérapies classiques ou aux radiothérapies, les traitements jusqu’ici privilégiés.

Pour Lucas, une deuxième mutation a eu lieu. Un phénomène inexpliqué au cœur des interrogations des chercheurs. « La tumeur de Lucas présentait une mutation extrêmement rare et nous pensons que c’est cette mutation qui a rendu ses cellules tumorales beaucoup plus sensibles au médicament », présume le Dr Grill. Pour le jeune belge, cette seconde mutation lui a donc permis de mieux répondre au traitement. « Notre hypothèse, c’est que cette deuxième altération a permis à Lucas de répondre au médicament qui lui a été donné, détaille Marie-Anne Debily, biologiste moléculaire au centre Gustave-Roussy, au Magazine de la santé. Ce qu’on va faire, c’est prendre les cellules d’un patient qui a le même cancer que Lucas mais ne présente pas cette deuxième altération, et les introduire in vitro, et vérifier que l’introduction de cette mutation va sensibiliser les cellules au médicament. »

Il faudra encore entre 10 et 15 ans de recherche, selon le Dr Jacques Grill, pour mettre au point la solution médicamenteuse idoine. Mais ce cas exceptionnel reste un motif d’espoir bienvenu, à l’heure où l’Organisation mondiale de la santé prévoit 35 millions de nouveaux cas de cancers d’ici à 2050. 

© C i E M / Mathieu Yerle